Un jour en crèche : 10 fr
Simple et révolutionnaire: le projet de financement des crèches présenté par le canton du Jura fait fort: il séduit tout le monde!
Les familles des classes moyennes se noient. Sous les impôts, les primes maladie ou les frais de garde. Mais, sur ce dernier point, le canton du Jura a lancé lundi un projet dont on n'a pas fini de parler. Un nouveau système de financement des crèches concocté en secret et destiné à soulager ces classes moyennes. Sur le papier, c'est une formule magique: un enfant en crèche pour une journée, 10 francs. Quel que soit le revenu des parents. Le projet pilote doit maintenant être discuté par toutes les parties.
Mais déjà tout le monde se penche sur ce bébé qui a le mérite de la clarté, éliminerait beaucoup de paperasserie comme de savants calculs. «C'est un pavé dans la mare! Une proposition d'envergure, alléchante, nécessaire et lisible», s'enthousiasme le municipal socialiste lausannois Oscar Tosato, en charge de la petite enfance. En ville de Lausanne, indique-t-il, pour un enfant à 100% en crèche, les parents déboursent de 150 à plus de 2000 francs par mois, selon leurs revenus. Dans le projet jurassien, ils auraient tous une facture de 200 francs.
Solutions d'avenir
«Pour résumer, on a aujourd'hui deux devoirs: construire des places d'accueil ici et maintenant, raconte Oscar Tosato. Et tenter d'imaginer de grandes solutions d'avenir comme vient de le faire le Jura. Travailler sur des projets qui reconnaissent que l'accueil préscolaire est un droit.»
Le président du Parti socialiste est lui aussi emballé. «Les enfants sont aujourd'hui un facteur de pauvreté: ce projet qui soulagerait les classes moyennes représente un pas dans la bonne direction, commente Christian Levrat. Il a aussi le mérite de partir du principe que les tâches éducatives ne sont pas l'affaire privée des familles.»
Président du PDC, Christophe Darbellay applaudit lui aussi: «C'est une très belle idée! Un projet que je suivrai avec la plus grande attention. L'Etat doit prendre à bras-le-corps la question de l'encadrement des tout-petits.»
Avant de s'engager pour porter l'idée au niveau fédéral, ces présidents prendront tout de même le temps de la réflexion. Et, surtout, ils veulent se pencher sur le financement.
Car, même s'il a des idées, le gouvernement jurassien n'a pas de baguette magique: il faut bien que quelqu'un paie. En l'occurrence, il s'agirait d'une saisie supportée à moitié par les employés et à moitié par les employeurs.
« Comme le ticket de bus »
Pour que le projet pilote jurassien se concrétise, il devra donc convaincre. Les salariés sans enfants devront accepter de se montrer solidaires. Tout comme les patrons. Pourtant, même du côté de l'économie, on ne se braque pas. Au contraire! «Le système actuel assomme la classe moyenne, l'idée jurassienne est a priori plus que séduisante, commente Pierre Weiss, vice-président des libéraux-radicaux. Si on décide que l'accueil des petits est un service à la population, alors le coût ne doit pas dépendre du revenu: ce doit être un prix unique. Comme le ticket de bus, si j'ose la comparaison.»
Mais le Genevois ne tique-t-il pas lorsqu'il entend que les entreprises devront passer à la caisse? «Elles pourraient demander une contrepartie, comme un droit de regard sur les coûts de fonctionnement des crèches. Mais ça vaut la peine de se mettre autour de la table pour en parler, non?» Manifestement, oui.
Date de parution : 19 mai 2009