Les crèches favorisent l'emploi et la tranquillité des mères
Quels sont les avantages des crèches ? Comment mesurer les bienfaits de ce mode de garde plébiscité par les parents ? A-t-il un impact positif sur le développement des enfants et la trajectoire professionnelle des mères ?
Une étude, réalisée en 2007 à Grenoble auprès de mille familles, permet, pour la première fois, de répondre précisément à ces questions. Et ses conclusions sont claires : les mères qui obtiennent une place en crèche se maintiennent plus facilement dans le monde du travail et elles portent un regard plus confiant sur leur enfant.
Réalisée par Eric Maurin, professeur à l'Ecole d'économie de Paris, et Delphine Roy, doctorante, l'étude compare, au moment de l'inscription à l'école maternelle, les familles qui ont obtenu une place en crèche à celles qui se sont vu opposer un refus. "Au moment de la naissance du bébé, ces familles avaient des besoins et des attentes semblables en termes de travail et de garde d'enfants puisqu'elles se sont dirigées vers le même mode de garde, souligne Eric Maurin. En les comparant trois ans plus tard, nous pouvons mesurer l'impact de l'obtention d'une place en crèche."
L'étude, consultable sur le site du Centre pour la recherche économique et ses applications (Cepremap), porte sur les familles ayant inscrit leur enfant à l'école maternelle, à Grenoble, en 2007. Trois ans auparavant, certaines avaient demandé une place en crèche : les deux tiers l'avaient obtenue, les autres s'étaient débrouillées avec d'autres modes de garde.
Parmi ces dernières, la plupart (40 %) avaient finalement opté pour une assistante maternelle, mais beaucoup (28 %), surtout dans les milieux défavorisés, avaient été obligées de garder elles-mêmes leur enfant. "Dans les milieux modestes, la crèche est le seul mode de garde payant réellement accessible", explique l'étude.
A Grenoble comme ailleurs, la naissance d'un enfant pèse lourdement sur la carrière des femmes : au cours des trois années qui suivent l'arrivée d'un bébé, le taux d'emploi des mères chute de 75 % à 60 %. Mais cette baisse est nettement plus prononcée chez les femmes qui n'ont pas obtenu de place en crèche : le recul de leur taux d'emploi est deux fois plus important que celui des autres. "L'amélioration très nette du taux d'emploi des mères dont l'enfant est pris en crèche repose tout autant sur un maintien plus fréquent dans l'emploi à temps complet que sur une meilleure progression de leur emploi à temps partiel", souligne l'étude.
Des parents plus confiants
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, cette amélioration de la trajectoire professionnelle n'est pas réservée aux femmes les plus diplômées : elle bénéficie à toutes les femmes qui ont obtenu une place en crèche, quels que soient leur diplôme, leur niveau de qualification ou leur nombre d'enfants. "L'effet très positif de l'obtention d'une place en crèche est exactement le même, que l'on raisonne ou non à nombre d'enfants et diplôme de la mère fixés", note l'étude.
Les parents qui ont obtenu une place en crèche portent en outre un regard nettement plus positif sur leur enfant. Interrogés sur le langage, la sociabilité, le retard ou l'adaptation à la maternelle, ils se montrent plus confiants que les autres parents : 26,1 % des familles dont l'enfant était en crèche déclarent n'avoir "aucun souci" dans aucun domaine contre à peine 18 % des autres familles.
La crèche semble donc apaiser les inquiétudes des parents, qui sont en général plus marquées dans les milieux faiblement diplômés ou lorsqu'il s'agit du premier enfant. "Etre acceptées en crèche permet aux femmes faiblement diplômées d'accéder à peu près au même niveau de sérénité vis-à-vis de leur enfant que les mères très diplômées dont la demande a été refusée, résument Eric Maurin et Delphine Roy. Et elle diminue le niveau de souci vis-à-vis du développement de l'enfant à peu près dans la même mesure que le fait d'avoir déjà eu un enfant."